Régions gonale et jambière

Régions gonale et jambière

A la cuisse, la superposition des veines superficielles conduisait à pratiquer des coupes transversales. Ce problème ne se pose plus à la jambe, l’hypoderme étant ici moins épais. En revanche, les différents réseaux y réalisent, dans un plan unique, de complexes anastomoses et circuits hémodynamiques. Ce sont donc de véritables « écorchés » en orthostatisme qu’il nous faudra étudier.

L’implication pathogénique des veines perforantes des régions gonale et jambière est présumée. telle que certains auteurs en ont préconisé l’éradication systématique afin de prévenir les récidives.

Ces veines perforantes ont été tout d’abord classées selon leur niveau : tiers inférieur de jambe pour les veines perforantes de Cockett basses, tiers moyen pour les veines perforantes jumelles et celles de Cockett hautes et, enfin, tiers supérieur pour les veines perforantes de Boyd.

Les premiers auteurs qui les ont systématisées leur ont attribué une certaine constance de localisation. Elles seraient ainsi alignées sur une droite verticale fictive appelée ligne de Linton. Celle-ci apparaîtrait parallèle au tronc saphène interne jambier et à un travers de doigt en arrière de la malléole interne.

De bas en haut s’étageraient ainsi les veines perforantes de Cockett I (précisément à 6-7 centimètres du sol), celles de Cockett II (à 13,5 centimètres), celles de Cockett III (à 18,5 centimètres), puis les veines perforantes dites « des 24 centimètres ». Elles assureraient la communication de la branche postérieure jambière de la saphène interne (veine de Léonard) avec les veines tibiales postérieures.

Cette « règle des perforantes » à localisation constante est contestée par d’autres anatomistes. Pour certains, la majorité des veines perforantes de cette région siégerait sur les collatérales qui relient la saphène interne à sa branche postérieure. Pour d’autres, enfin, leur disposition tiendrait du hasard, leur niveau par rapport au sol étant particulièrement variable.

D’un point de vue anatomique et fonctionnel, ces veines perforantes pourront être classées non selon leur niveau d’abouchement, mais selon leur disposition rapportée à l’axe saphène. Le type de circuit auquel elles participent s’explicitera d’autant mieux lors d’une cartographie veineuse.

Nous proposons ainsi de distinguer quatre types de veines perforantes gonales et jambières :

Figure 62: Les veines perforantes centrées sur le tronc saphène interne jambier ou sur une dérivation localisée .
Figure 62: Les veines perforantes centrées sur le tronc saphène interne jambier ou sur une dérivation localisée .

Figure 63: Les veines perforantes centrées sur une saphène accessoire jambière antérieure ou postérieure.
Figure 63: Les veines perforantes centrées sur une saphène accessoire jambière antérieure ou postérieure

Figure 64: Les veines perforantes centrées sur les collatérales de la saphène jambière ou sur le reticulum du mollet.
Figure 64: Les veines perforantes centrées sur les collatérales de la saphène jambière ou sur le reticulum du mollet.

Figure 65: Les veines perforantes centrées sur les communications intersaphéniennes jambières.
Figure 65: Les veines perforantes centrées sur les communications intersaphéniennes jambières.

La prise en compte simultanée de la situation anatomique de ces veines perforantes et du circuit hémodynamique auquel elles participent permet de préciser les types de shunts veinoveineux que l’on observera.

La plupart de ces veines perforantes subissent globalement l’attraction de l’axe saphène interne. Elles peuvent néanmoins former des circuits hémodynamiques complexes et indépendants. En effet, certaines d’entre elles sont incontinentes en systole et en diastole musculaires alors que d’autres ne le sont qu’en diastole (cliquez ici). D’autres encore autorisent la réentrée d’un reflux sus-jacent. De plus, elles sont parfois reliées les unes aux autres par des anastomoses longitudinales interperforantes à l’origine de récidives.

Les veines perforantes de cette région communiquent avec différents axes veineux profonds. Les veines perforantes de la région sousgonale interne (veines perforantes de Boyd) s’ouvrent dans les veines tibiales postérieures ou dans le tronc tibio-péronier. Groupées en nombre variable (3 à 6), le plus souvent indirectes, elles sont centrées sur une veine saphène accessoire ou une branche collatérale. Elles décrivent un long trajet intramusculaire et restent grêles. Elles ne sont que rarement le siège d’un reflux massif et sont le plus souvent à l’origine de varicosités de la région interne des genoux.

L’émergence d’une veine grande anastomotique dans la région des veines perforantes de Boyd constitue une éventualité rare. Elle demeure satellite de la branche cutanée de l’artère anastomotique avec laquelle elle perfore l’aponévrose du canal de Hunter. Se jetant dans la veine fémorale superficielle, mais n’émergeant de l’aponévrose qu’à l’étage sous-gonal interne, cette veine représente en fait une variété de veine perforante huntérienne. Elle met en relation la veine fémorale superficielle avec le tronc saphène jambier ou ses branches accessoires et collatérales.

Les veines perforantes musculaires de la face interne du mollet sont centrées sur les veines jumelles internes. En fonction de leur point de pénétration musculaire, Cl. Gillot les subdivise en polaires supérieures, moyennes et inférieures. Seules ces dernières sont axées sur la saphène externe. En général indirectes, multiramifiées, recevant des rameaux intramusculaires, ces veines perforantes jumelles proviennent d’une dérivation du tronc saphène interne (Figure 62), d’une saphène accessoire (Figure 63), du reticulum du mollet (Figure 64) ou encore, d’une communication intersaphénienne (Figure 65). Fréquentes, ces veines perforantes jumelles sont impliquées dans les récidives et l’extension des thromboses superficielles à la voie profonde.

L’ensemble des veines perforantes dites de Cockett est centré sur les veines tibiales postérieures. Elles peuvent naître de la veine de Léonard, mais aussi de communications entre celle-ci et la saphène, d’une saphène accessoire postérieure ou de collatérales. Les plus hautes servent souvent de réentrées aux reflux susjacents. Les plus redoutables d’un point de vue pathogénique sont les veines de Cockett basses. Situées à un travers de main au-dessus de la malléole interne, leur trajet est court et direct. D’accès difficile, leur ectasie est palpable bien en dessous du site de perforation aponévrotique, au sein d’une zone d’hypodermite qu’elles génèrent ou aggravent.

Les veines perforantes de la région antéroexterne de la jambe sont centrées sur les veines tibiales antérieures ou péronières. Ce sont généralement des veines perforantes de réentrée pour des reflux issus du réseau saphène antérieur de la cuisse. Pouvant générer des varicosités, elles ne sont qu’exceptionnellement à l’origine de troubles trophiques.

Toutes ces veines perforantes constituent avec les collatérales et les saphènes accessoires, un véritable système saphène interne. Un éventuel reflux sanguin s’inscrira dans un circuit original, un shunt veinoveineux auquel participent des veines perforantes dilatées qui sont soit incontinentes, soit des veines de réentrée vers les voies profondes.

Pour en savoir plus

Dodd H., Cockett EB. The pathology and surgery of the veins of the lower limb. Londres, Churchill Livingstone, 1976.

Fischer R., Fulleman N.H., Alder W. A propos d’un dogme phlébologique sur les localisations des perforantes de Cockett. Phlébologie 1992; 45: 207-12.

Gillot C. Anatomie chirurgicale des perforantes de la jambe. Phlébologie 1987; 40: 563-74.

Staubesand J., Stemmer R. Études anatomiques sur la constance des perforantes de Cockett. Phlébologie 1987; 40: 599-604.